Jeudi 05 décembre 2013, 12:30 pm
Homestead, Florida
« _ Allo ! C’est bien monsieur Jérôme Gorin à l’appareil ?
_ Oui, c’est bien moi… À qui ai-je l’honneur?
_ Commissaire Ducon, du commissariat de Belleville, dans le XIXème arrondissement de Paris !
_ Ben ça alors, j’ai déjà entendu votre nom quelque part… Vous n’auriez pas de la famille aux États-Unis par hasard?
_ Non, monsieur… Et puis nous ne sommes pas là pour parler de ça. Alors répondez à ma question s’il vous plait : où étiez-vous ces huit derniers jours s’il vous plaît monsieur Gorin?
_ Mais pourquoi me demandez-vous cela ? Il s’est passé quelque chose de grave monsieur le commissaire ?
_ Il y a que nous avons reçu moult plaintes concernant des vols de sacs à main dans votre quartier ces derniers jours et nous procédons à une enquête !
_ Ah, j’y suis… Enfin non, je n’y suis pas, enfin je veux dire dans le quartier… Je n’y suis pas car je suis en Floride actuellement… D’ailleurs, cela fait déjà huit jours qu’on y est en Floride. Vous connaissez, non ? En tout cas, je ne peux pas être un suspect crédible pour vous. Par contre, je peux peut-être vous aider, car si vous voulez dédommager toutes ces pauvres femmes en leur offrant au moins un sac, j’ai toute la matière première à disposition dans le coin ! Une vraie maroquinerie sur pattes ! Je vous assure, rien qu’avec tous les alligators que j’ai vus aujourd’hui, j’aurais déjà pu vous en confectionner un bon millier, de sacs ! Le plus compliqué, c’est de réussir à les vider de leur viande et organes en tout genre, et de leur coller une poignée au-dessus sans que ça les énerve… Parce que c’est vrai qu’ils n’ont pas l’air d’avoir bon caractère ces animaux, enfin au premier abord en tout cas…
_ Mais de quoi me parlez-vous monsieur Gorin, et qu’est-ce que c’est que cette histoire de maroquinerie sur pattes ou je ne sais quoi ?
_ Ben c’est parce que je suis pour de vrai en Floride monsieur Ducon ! Vous permettez que je vous appelle Ducon, monsieur le commissaire ?
_ Faites vite, je vous prie !
_ Donc, en Floride, il y a un immense National Park qu’on appelle les Everglades, et c’est ici que j’ai passé la journée d’aujourd’hui, avec ma femme et mes enfants, au milieu des alligators et autres animaux sauvages. C’est magnifique, vous devriez emmener votre famille ici pendant les vacances. Et puis je ne sais pas quel temps vous avez à Paris en ce moment, mais nous, on supporte difficilement le T-shirt tellement il fait chaud… Heureusement, il y a aussi de très jolies plages dans la région… Mais pour revenir à nos alligators, c’est certain qu’il y aurait ici de quoi fabriquer à toutes ces malheureuses de magnifiques sacs à mains made in Florida, encore faut-il d’abord les tuer, et ça, c’est une autre paire de manches…
_ Mais je ne vous ai pas demandé de me confectionner des sacs, je vous ai juste demandé ce que vous avez fait depuis une semaine !
_ Ah, mais attendez, je sais comment on peut faire sinon ! Vous ne la connaissez pas cette histoire ? Je crois que c’est Coluche qui la racontait : C’est trois potes qui partent à la chasse aux crocodiles, mais ils n’arrivent pas à en tuer un seul car leurs balles ricochent sur la peau des animaux, alors ils vont voir un vieux bonhomme du coin, et lui demandent conseil. Le vieux, il leur dit que le seul moyen d’en dégommer un, c’est de viser son œil. Alors ils essaient les chasseurs, mais c’est trop dur parce que les yeux des crocos, c’est tout petit et on a du mal à les avoir…
Du coup, le vieux leur dévoile son secret… Il leur dit d’apporter tous les matins un chou à la crème aux crocodiles, car ils adorent ça. Les trois compères prennent note et dès le lendemain, déposent un chou à la crème au bord de la rivière. Et en effet, un des crocos s’approche doucement, regarde un peu partout si ça ne sent pas l’embrouille, et il avale le chou à la crème avant de repartir dans l’eau… Les trois chasseurs retournent voir le vieil homme et lui disent que ça a marché, alors le vieux leur répond de faire ça tous les matins pendant une semaine. Et une semaine passe, et le même crocodile vient tous les matins prendre son petit chou à la crème, sans plus aucune appréhension… C’est alors que le vieux donne le dernier conseil aux trois novices : le lendemain, ils devront poser un chou de Bruxelles à la place du chou à la crème, et attendre la réaction du crocodile tout en se tenant prêt à dégainer… Et le jour suivant, ils déposent donc un chou de Bruxelles au bord de l’eau, et le crocodile arrive, comme d’habitude, se préparant à son petit festin quotidien. C’est alors qu’en s’approchant de la nourriture, il s’aperçoit que ce n’est pas ce à quoi il s’attendait, regarde les trois chasseurs, et leur dit, agacé : ”Ça, un chou à la crème? Mon œil!” en s’aidant de sa patte avant droite pour l’ouvrir le plus grand possible… Et c’est alors que ”Pan!”, les chasseurs tuent le pauvre animal sans lui laisser la moindre chance…
Alors, vous en pensez quoi de cette idée monsieur le commissaire ? C’est pas mal comme technique non ?
_ Vous me fatiguez monsieur Gorin, et puis je me demande si vous ne me menez pas en bateau avec vos histoires…
_ Ah non, le bateau, on s’est renseigné, mais c’est trop cher… Vous savez, les petits bateaux à hélices pour naviguer sur les marais, ça coûte un fric fou, et pareil pour les vélos, la location, c’est hors de prix, alors je ne me suis pas emmerdé, je suis monté sur Ducon pour faire mes photos… Pas vous, monsieur le commissaire, bien évidemment… Je parlais du Ducon qui vit aux Etats-Unis, mon Ducon à moi.
_ Et tout ceci ne me dit pas ce que vous avez fait auparavant…
_ Ben, avant, c’est comme je vous l’ai dit, monsieur le commissaire… on est arrivé en Floride le mercredi en fin d’après-midi, juste après avoir changé les batteries de Ducon, le mien. C’est fou d’ailleurs à quel point ça lui a donné une seconde jeunesse à cet asticot, car maintenant, il reste en autonomie toute la nuit, on n’a plus à chercher à se brancher si on a besoin de chauffage (comme si on en avait besoin, alors qu’il fait entre 25 et 30 degrés ici…), et en plus, on peut stocker des provisions dans le congélateur sans craindre qu’il ne s’éteigne au milieu de la nuit ! C’est pas beau ça ?
Ce sont les champs de coton qui nous ont accueilli à notre arrivée dans l’Etat, avec la lumière qui tombait tout doucement, c’était trop joli.
On avait décidé de pousser jusqu’à la capitale, Tallahassee, car on avait trouvé un endroit pour fêter Thanksgiving le lendemain.
_ Certes, mais ça ne donne pas beaucoup de témoins qui peuvent me confirmer que ce que vous me dites est vrai…
_ Nous y arrivons, monsieur le commissaire… Comme on ne voulait pas fêter Thanksgiving en restant tous les cinq dans le camping-car, ni en allant dans un restaurant dépenser une fortune tout en essayant de contenir l’état semi hystérique dans lequel nos enfants entrent dès qu’ils restent assis plus de quatre minutes dans un lieu comme ça, on s’est dit qu’on allait partager ce repas avec des gens qu’on avait davantage envie de rencontrer pour l’occasion, puisque c’est aussi ça le principe de cette fête. Alors on a regardé les repas organisés sur les petites annonces, et on s’est pointé dans une église baptiste après leur avoir demandé si l’on pouvait venir.
Ben oui, tu crois quand même pas qu’on allait participer à un repas d’anciens combattants, venus avec le béret et les médailles, et qui te sort tout le long du repas ses exploits au Vietnam ou d’ailleurs, parce que moi, je me connais, je lui aurais dit de ne plus me gonfler avec ses conneries au bout de cinq minutes, et d’aller bouffer sa dinde chez lui en matant Rambo 18 !
Du coup, c’était sympa, on a déjeuné dans une grande salle à côté de l’église, on a été super bien accueilli, on s’est régalé, même les enfants, et ça s’est fini à l’américaine, on est reparti avec les restes qu’on a pu boulotter le soir même !
Et vous pouvez aller leur demander dans cette paroisse s’ils se souviennent de nous monsieur le commissaire… c’est certain que oui, on était les seuls blancs dans la salle !
Après ce bon moment, comme on ne savait pas trop quoi faire pour occuper la fin d’après-midi, ben on est tombé en panne d’essence ! Heureusement, on était à un demi mile de la station, c’est-à-dire environ 800 mètres, donc la distance était relativement courte pour aller remplir deux gallons d’essence, ce que Jess s’est proposée gentiment de faire, histoire de digérer un peu de son repas du midi. Elle est arrivée comme la libératrice de la famille quelques minutes plus tard, et on a pu redonner des couleurs et de l’énergie à Bessie qui, décidément, subit tout plein de traumatismes en ce moment…
Il était temps de se reposer un peu, et c’est sur le parking bondé d’un Wal Mart que nous avons décidé de nous échouer pour la nuit. Mais pourquoi bondé me direz-vous ? Tout simplement car nous étions la veille de Black Friday, le grand jour des soldes tant attendu par tout un pays ! Et économie oblige, le « Vendredi Noir » est bien plus bénéfique s’il commence dès le jeudi soir ! Du coup, les gens affluent devant le grand cirque, connaissant déjà parfaitement l’itinéraire dans les rayons qui va les mener au téléviseur tant attendu par toute la famille, ou alors le télescope dont tout le monde se contrefiche mais qu’on achète quand même parce que merde, t’as vu la bonne affaire que je fais en le prenant aujourd’hui !
En plus, ça ne veut plus rien dire ce Black Friday, car en fait, à l’origine, c’était censé coïncider avec le début des achats de Noël, dont bien sûr les jouets en première ligne. Mais tu penses bien que ça fait un bail qu’ils sont sortis les joujoux aux enfants, on n’a plus de temps à perdre avec ces coutumes à la con, on fait du business les gars !!!
Bref, on est allé y faire un petit tour comme on logeait pas loin, et Jeanne est encore tombée sous le charme d’un nouvel animal, un poney ce coup là, mais on a réussi à lui faire comprendre que le poney, il reste à l’écurie, et que l’écurie, c’est Wal Mart !
Mais elle est pas folle la gamine, et elle a réussi à nous en faire une belle ensuite : Elle nous a sorti une liste de cadeaux de Noël aussi longue que le manuscrit original du bouquin de Kerouac, « Sur la route », mais en essayant de nous expliquer que c’était pour notre bien. Ben ouais, comme ça, on n’aura pas à dépenser trop d’argent pour les lui acheter à d’autres occasions de l’année, puisque c’est le Père Noël qui va raquer pour tout à la fin du mois ! OK ma chérie, je lui en parlerai au Père Noël, et puis on verra bien comment il réagit… et ce qu’il peut faire pour toi !
_ Monsieur Gorin, vous vous égarez dans vos explications… Allez à l’essentiel s’il vous plaît !
_ Ben, vous me demandez ce que j’ai fait, je vous le dis moi… Alors, le lendemain, on a poursuivi notre descente vers le sud, et on s’est arrêté à Mayo, histoire de voir un peu à quoi ressemble une ville de la Floride, paumée au milieu de nulle part. On dirait un peu les villages dans lesquels Zorro réglait les comptes à tout le monde, avec des bagnoles et des fast foods en plus.
On n’est pas resté bien longtemps et puis on a filé vers le Manatee Springs State Park, un endroit où viennent de temps en temps se reposer des lamantins Bon, ce jour là, apparemment, ils avaient autre chose de prévu, parce qu’on n’en a pas vu un, mais l’endroit était beau, on a pris le soleil au bord de la rivière, et on a découvert un autre aspect de la végétation floridienne, de plus en plus sauvage… On se serait presque cru dans un décor de studio de tournage installé pour l’occasion.
_ Mais vous étiez à Hollywood ou en Floride au juste ?
_ En Floride, monsieur Ducon ! On s’approchait même sérieusement de Tampa, qui borde le Golfe du Mexique. Avant d’aller découvrir la ville, on a longé la côte car on voulait voir la mer. Le temps n’était pas génial, ça devait à peine atteindre les vingt degrés, c’est quand même frisquet pour un début décembre ! On s’est aventuré sur les îlots, les « keys », comme on dit ici, auxquels on accède par un pont, et on a choisi la plage Indian Rocks comme terrain de jeu.
C’est pas simple pour se garer dans le coin, et tout est payant, alors comme en plus on prend quatre emplacements avec Ducon, c’est l’angoisse… Mais c’est là que Debra est arrivée, sortant de sa terrasse qui donne sur un des parkings publics de la plage, et nous a dit de nous garer là, et de ne pas nous en faire. Et quand tu vois la tronche de Debra, tu te dis que personne ne viendra la contredire… Et puis si quelqu’un trouve quelque chose à redire, elle lâche le fauve, et là mon pote, t’es mal barré !
Le fauve en question s’appelle Precious, et faut pas venir lui chatouiller les oreilles à Precious, sinon elle montre les dents. Il n’y a bien que Jeanne qui a réussi à entamer une relation amicale avec elle, mais Jeanne, c’est bien connu, est l’amie des animaux.
On est resté jouer une petite heure dans le sable et puis on s’est rapproché de Tampa pour la soirée.
Le lendemain, ça a été très dense comme journée, pourtant c’était dimanche, mais on n’a pas arrêté du matin au soir.
Je vous le fais rapide monsieur le commissaire : on a commencé par une excursion le long d’une plage pour bien débuter la journée, après on a vu des mecs en slip rouge qui posaient à côté du Père Noël, et puis on a fait du tourisme près d’une centrale électrique…
_ Vous allez me développer ça un petit peu monsieur Gorin, car je n’y comprends pas grand chose…
_ Bah, alors le matin, Jess, c’est le p’tit nom de ma femme, a trouvé un endroit au bord de la mer, Picnic Beach, qui avait l’air sympa. C’est dans la banlieue de Tampa, et ça se trouve juste après une énorme usine qui fabrique je ne sais quoi, ce qui fait que jusqu’au dernier moment, tu te demandes bien où l’on t’envoie.
Et puis une fois sur place, c’est agréable, alors on en a profité, en alternant balade en forêt et sur la plage, partie de foot et grimpette dans les arbres.
Ensuite, on a traversé Tampa et on s’est rendu directement dans le quartier cubain, Ybor City, du nom d’un mec qui a développé le commerce du cigare en implantant une usine de fabrication au cœur de ce coin de la ville, et a prospéré au point d’en devenir le symbole.
L’ambiance latinos y est bien présente, à tous les coins de rue, et ça parle plus espagnol qu’anglais, c’est rigolo. Le business semble être axé sur les cantines et la vente de cigares, on entend de la salsa qui sort des haut-parleurs des belles voitures, ou par les fenêtres des appartements.
Et puis après, on est tombé sur les hommes rouges. Apparemment, ils sont potes avec le Père Noël, parce qu’ils étaient en train de discuter ensemble quand on est arrivé. Ils sont pas frileux les mecs, parce qu’ils portaient juste un slip rouge, des chaussures et des lunettes… Je me suis dit que j’aurais pu aller avec eux pour faire plus ample connaissance, et puis j’aurais pu parler au Père Noël des exigences de ma fille au niveau de sa liste, mais bon, j’avais que les lunettes et les baskets de semblables, mes slibards étant beaucoup moins sexy que les leurs… et puis disons que je passe beaucoup moins d’heures qu’eux à la salle de muscu, et ça se remarquerait sur la photo !
N’empêche qu’ils étaient là pour une bonne cause, car il s’agissait d’une course à pied organisée afin de récolter de l’argent pour la lutte contre le sida, alors bravo aux hommes rouges, et attention aux coups de soleil !
Puis on est reparti, direction Fort Myers, encore plus au sud, car on avait de la famille à notre copine Vanessa à aller visiter pendant qu’on était dans le coin.
Sur la route, Jess a trouvé la présence d’une centrale électrique, qui a la particularité d’être aussi un lieu de passage de toute une colonie de lamantins, profitant de la chaleur des eaux locales, réchauffées par l’activité de l’usine, pour venir passer leurs journées à profiter à l’œil d’un bon bain chaud…
Donc au départ, ça surprend un peu, car le paysage est plutôt un peu flippant, mais on dirait que la nature cohabite plutôt bien avec l’activité industrielle locale, au point même qu’ils en ont fait une réserve naturelle de cet endroit.
Alors, c’est marrant, tu te pointes là-dedans, et t’es accueilli un peu comme à Disneyland, sauf que le château de la princesse a une drôle de gueule en arrière-plan !
Après, tu regardes le plan d’eau, et tu tombes sur d’immenses masses, ou plutôt tu les devines car les lamantins ne viennent quasiment jamais à la surface, et ce sont des sortes d’ombres très sombres que tu vois. Bof…
Moi, j’ai préféré mater et photographier les culs des gens qui s’extasiaient devant ce spectacle, c’était bien plus drôle ! Ma pauvre maman, tu dois avoir honte de ton fils…
Et puis histoire de ne pas me barrer d’ici sans avoir un spécimen à mettre dans mon album de souvenirs, j’ai photographié le lamantin en plastique à l’entrée, c’est là qu’on se fait la meilleure idée de ce à quoi ils ressemblent…
_ Tout ça est bien charmant, mais le lendemain, où étiez-vous alors ?
_ Ben, comme je vous l’ai dit, le lendemain, on voulait passer voir la tante de notre copine Vanessa à Fort Myers. Elle s’appelle Danièle et elle est installée ici depuis un bon bout de temps je crois. Et puis, cerise sur le gâteau, la maman de Vanessa, Noëlle, était venue de sa Bretagne pour passer quelques semaines sous la chaleur floridienne, et on allait avoir la chance de la voir, elle et son compagnon Henri. Comme quoi le hasard fait bien les choses…
J’ai eu Noëlle au téléphone le matin, et on a convenu de se retrouver pour le dîner dans la maison de Danièle, le soir même. Et vous savez quoi, on a passé un moment délicieux… D’ailleurs, je commence à me dire que ce qui est vraiment génial quand on trace la route dans un pays si grand pendant aussi longtemps, c’est quand ça s’arrête un peu, le temps d’une soirée, d’un repas, surtout quand on est reçu comme on l’a été ce soir là.
On avait passé la journée à donner les cours à Jules dans une librairie publique, et puis on était allé soulager Ducon dans un camping – dix dollars qu’ils nous ont demandé ces salopards ! – et c’est là qu’on a compris un des aspects de la Floride. On avait lu en effet que la Floride était surnommée « la salle d’attente pour le Paradis », ceci étant dû à une moyenne d’âge assez élevée des gens qui y vivent, et on a aussi constaté que dans le coin, certains campings vont même jusqu’à n’admettre que les gens âgés de cinquante-cinq ans et plus ! Je te dis pas comment tu te sens jeune, voire même un petit peu merdeux, quand tu es de passage dans le zoo !
Après, on a longé Fort Myers Beach, et on s’est arrêté sur une plage histoire de se dégourdir un peu les jambes.
Et puis comme j’ai raté le coucher de soleil sur la plage, je me le suis fait sur le pont, c’est mon côté urbain ça !
Le reste de la journée s’est déroulé chez Danièle, qui nous a reçu comme des rois avec sa sœur Noëlle et Henri, c’était génial. On a passé la soirée à raconter notre périple, à parler aussi des potes d’Orléans, et des choses à voir dans le coin. Le tout accompagné de bon vin, de rôti de porc et de fromage, le paradis quoi…
On a garé Ducon dans le jardin et on a dormi là, heureux comme tout d’avoir passé un si bon moment avec des gens si chaleureux.
_ C’est vrai qu’il a l’air pas mal votre voyage, monsieur Gorin… Vous voulez bien me raconter ce qu’il s’est passé le jour d’après ?
_ Bien sûr… on a pris notre petit-déjeuner chez Danièle, et puis on suivi le conseil de Noëlle, qui nous avait suggéré d’aller faire un tour sur Sanibel Island, sur le Golfe du Mexique. Alors comme le temps était, encore ce jour là, très beau, on n’a pas hésité longtemps et on s’est mis en route après avoir dit au revoir à nos amis.
Au départ, on y allait vraiment pour profiter de la plage et c’est tout, mais en arrivant, on a constaté qu’il y avait une réserve animalière dans l’île, le Darling National Wildlife Refuge. Les couples de tout âge y vont pour admirer la nature, pêcher, et bien sûr profiter de la présence de tous ces animaux sauvages. C’est un très bel endroit et tout se fait en véhicule.
On y a vu tout de même des hérons, des pélicans, et tenez-vous bien, des alligators ! Il faut faire gaffe avec ces bestioles car elles ne bougent absolument pas, on ne les remarque pas, mais si elles vous mettent le grappin dessus, c’est trop tard… C’est la première fois que j’en voyais en milieu naturel, c’est assez impressionnant.
Après ça, on a filé sur Captiva Island, une île au nord de Sanibel, et là, on a profité de la plage à fond. Moi, j’ai commencé par m’assoupir quelques minutes au soleil, tellement j’étais bien. Et puis ensuite, je suis allé tremper les pieds dans l’eau, pour prendre la température ambiante, et comme elle était bonne, j’ai trempé tout le reste ! J’adore être dans la mer, sentir les courants qui nous portent, nous éloignent, puis nous rapprochent de la rive, c’est trop bon.
J’ai dû rester une demi-heure dans l’eau au moins, je ne voulais plus en sortir. J’ai emmené Jules avec moi un peu, et puis Jack ensuite, ça les rend dingues les gosses d’être un peu au large, ils sont surexcités !
Puis est arrivée l’heure des jeux de sable, autre activité de plage qui peut, elle aussi, rendre fous les enfants…
Enfin voilà, monsieur le commissaire, tout ça sur fond de palmiers, de soleil et de ciel bleu, la belle vie quoi, vous voyez ce que je veux dire…
Et puis le jour d’après, ben je vous en parlais tout à l’heure, c’est le National Park des Everglades, avec sa nature assez exceptionnelle et ses fameux alligators qu’on ne compte plus tellement ils sont nombreux…
Alors vous comprenez bien qu’au milieu de toutes ces belles choses, vos histoires bellevilloises me semblent bien lointaines, et ne me concernent absolument pas pour l’instant…
_ Bien, je crois que vous m’avez convaincu, monsieur Gorin. Et à quoi va ressembler la suite ?
_ Oh, vous savez, on ne planifie pas trop… même si je pense que nous allons passer encore une journée dans les Everglades, et puis après on va essayer de profiter de la mer au maximum avant Noël, c’est vrai qu’on se marre bien par ici…
Franchement, vous devriez essayer de passer dans le coin, ça vous changerait… Et puis tiens, pendant que j’y pense, vous pourriez même profiter de l’occasion pour aller taper le carton ce week-end pendant la fête nationale de la cacahuète, c’est bien votre style ça, non ? »